Restauration d’un coffre mexicain

catherine auguste
par Catherine AUGUSTE
ancienne élève des Beaux-Arts de Paris
designe et décore des cabinets de curiosités

Un exemple de restauration d'un joli coffre en bois du XIXème siècle.

 

1/ L’état du coffre et son histoire

 

un coffre peint mexicain
© catherine auguste

Il s’agit d’un coffre apprêté et peint à l’huile qui a subi de nombreuses dégradations sur toutes ses faces extérieures. Seul l’intérieur est relativement intact. Le couvercle bombé a été le plus touché : le bois est apparent sur la majeure partie de la surface et la peinture s’écaille au toucher. Toutes les faces sont décorées à l’exception du pan arrière simplement badigeonné de rouge.

Avant de nettoyer le coffre j’ai fait un inventaire des motifs, des frises et de tous les indices qui me permettraient de le dater. Je savais déjà qu’il provenait du Mexique selon les propriétaires.

Sur le couvercle divisé en trois parties du fait de son aspect bombé, j’ai pu deviner un premier motif peu visible et en poursuite de dégradation : un aigle reposant sur un nopal (figuier de barbarie) et tenant dans son bec un serpent. De part et d’autre de cet aigle, deux bannières croisées qui reprennent le drapeau du Mexique (vert, blanc, rouge). J’avais envie d’en savoir plus sur ce pays et ce coffre. J’appris rapidement que l’association aigle + nopal + serpent est l’emblème du Mexique, visible sur le drapeau national actuel. Ce motif recouvre tout l’intérieur du couvercle, signifiant encore plus l’origine de ce coffre. La nation mexicaine avait choisi un drapeau à trois bandes (vert, blanc, rouge) lors de son indépendance en 1821. L’emblème n’a été ajouté de façon définitive qu’à partir de 1823 sur le drapeau. Or les drapeaux de ce coffre n’avaient d’emblème. Ce coffre avait donc une histoire et je pouvais rêver de le dater assez précisément entre 1821 et 1823, entre l’indépendance et l’apposition de l’emblème sur le drapeau.

 

2/ Les choix de restauration

 

Le choix a été de restaurer les motifs, le plus possible, afin de rendre au coffre le côté frais et naïf des objets de tradition populaire, ainsi que son intérieur le montrait. Le décor a été conçu de façon très symétrique : les mêmes frises se retrouvaient aux mêmes endroits encadrant ainsi les grappes florales, le paysage urbain et les scènes historiées. Je n’avais, pour ainsi dire, aucune amplitude d’interprétation dans la remise en état du décor. Il me suffisait de reprendre avec patience les manques très nombreux. Tant mieux, je n’avais qu’à me laisser guider et agir techniquement.

 

3/ Les principes techniques

Les recettes utilisées pour cette restauration sont disponibles sur le site du meuble peint :

 pour trouver la recette de la colle de peau du Site du Meuble Peint

 pour réaliser des patines à la cire

Les divers produits peuvent être achetés sur la boutique du site en www.droguerie-couleur.com.

 

Le principe a été de restaurer face par face afin de garder le maximum d’informations sur le rendu des matières, les couleurs et leurs tonalités et l’organisation du décor.

Première étape : relever tous les motifs sur papier calque puis faire tomber au fur et à mesure ce qui doit tomber, dépoussiérer et nettoyer.

Deuxième étape : mise en œuvre de l’apprêtage et coloration des motifs face par face.

Troisième étape : le vieillissement à la laine d’acier de certains endroits nouvellement peints et patine de l’ensemble.

restauration des peintures d'un coffre mexicain
© catherine auguste

Tout n’a pas été repris car l’aspect final serait apparu trop neuf. Certains petits trous ont été comblés par la patine, les frises ont été atténuées aux endroits où les usures sont naturelles comme les coins ou les parties saillantes. Sur ce coffre un gros bourrage à la cire (plus de 5 cm d’étendue) a été fait sur un bord, j’ai pris le parti de le laisser. Les bases du coffre sont, de fait, toujours abîmées ou rognées, ainsi je n’ai pas toujours appliqué d’apprêt ni trop soigné ces endroits. D’ailleurs, l’apprêtage se serait effrité rapidement rien qu’en posant ou déplaçant le coffre.

Pour limiter les erreurs, j’ai procédé à des essais de couleurs et de patine sur de petites surfaces.

 

4/ La frise de la face, un exemple de restauration

A l’aide d’un calque reprendre le motif de la frise.

 

Si la frise ou le motif doit être totalement enlevé, prenez des notes de couleurs

reprendre les motifs sur calque
© catherine auguste

 

Enlever tous les apprêts et les couches de peinture qui s’effritent ou menacent de tomber. Nettoyer délicatement les poussières et les surplus de cire à l’éponge savonneuse et au décireur.

 

Il ne faut pas avoir peur d’ôter toutes les parties qui menacent de tomber car elles ne tiendront pas plus avec la patine finale.

 

dégagement des peintures abimées
© catherine auguste

 

Préparer un apprêt coloré d’oxyde rouge à partir de la recette du site du meuble peint. Boucher au pinceau brosse tous les manques en essuyant le surplus sur les bords.

 

Ne pas hésiter à colorer l’apprêt car en créant des usures à la laine d’acier c’est une couleur qui apparaîtra et non du blanc pur.

 

application des apprêts
© catherine auguste

 

Laisser sécher avant de passer une autre couche. Enfin poncer délicatement avec du papier anti-encrassant fin pour arriver à une surface relativement plane.
Procéder ainsi pour tous les manques qui le méritent.

 

Poncer délicatement les contacts apprêt et peintures anciennes pour éviter des boursouflures disgracieuses.

 

ponçage des apprêts
© catherine auguste

 

Après séchage complet des apprêts, appliquer un jus de peinture à l’huile vert (bleu outremer, ocre jaune et jaune de cadmium).

Reporter le dessin de la frise.

 

Ne pas essayer d’obtenir déjà les couleurs de l’existant, les patines atténueront la fraîcheur des couleurs et donneront les tonalités jaunes finales.

 

mise en teinte des fonds et report des motifs
© catherine auguste

 

Commencer à peindre à l’huile le motif. Rester souple dans le geste du pinceau.

 

Si vous avez mis trop d’épaisseur, si le motif vous semble trop neuf, usez astucieusement le motif, une fois sec, avec de la laine d’acier fine.

 

peinture des motifs
© catherine auguste

 

Quand tout est définitivement sec, appliquer la patine, mélange de cire et d’oxydes (terre de Sienne, ombre naturelle, ocre jaune…) jusqu’à atteindre les couleurs des parties intactes.

Procéder de la même façon pour toutes les parties à restaurer.

 

application des patines
© catherine auguste

 

 5/ Etat après restauration du coffre mexicain

L'intérieur du coffre, qui n'a subi que de très faibles restauration témoigne de la fraîcheur originelle des couleurs.

coffre peint mexicain après restauration, son intérieur
© catherine auguste

 

Vue de dessus :
Remarquez l'organisation symétrique des décors.
dessus du coffre mexicain après restauration
© catherine auguste

 

Vue de côté :
Toutes les scènes et les paysages sont encadrés de frises répétitives.
lions et paysages sur coffre mexicain peint
© catherine auguste

 

Détail sur le dessus du coffre :
Souplesse du geste du pinceau.
Les motifs sont traités rapidement.
détail de la panthère sur le coffre mexiacain
© catherine auguste

 

Détail du dessus du coffre :
L'aigle tenant le serpent dans sa bouche, emblème du Mexique.
l'aigle, emblème du mexique
© catherine auguste

 

   

 

 


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