Recettes Pour
|
|
Comme beaucoup d’éléments de notre vie, la peinture est
sujette à des phénomènes de mode. Un nouvel état d’esprit se
fait jour avec le désir de revenir à la technique des anciens
Maîtres : effets émaillés, redécouverte des glacis etc. Bien qu’offrant un éventail plus grand de couleurs et un
nombre de produits complémentaires impressionnants, paradoxalement,
les peintures actuelles ne nous permettent qu’imparfaitement d’effectuer
le même travail. Car c’est au cours du XIXème siècle et dans la
première moitié du XXème que l’on a assisté à ce qu’il est
convenu d’appeler la perte des traditions techniques. Deux
inventions sont responsables de cet état de choses. Rapidement, d’autres éléments commercialement intéressants, mais néfastes à la pâte même viendront s’ajouter: cire, graisse, saindoux qui donneront une matière agréable à l’œil mais, malheureusement, débarrassée des éléments qui faisaient sa richesse. Dès lors, on comprend mieux que les produits que nous utilisons aujourd’hui, n’ont plus rien en commun, hormis le nom, avec ceux du passé. Faut-il, pour autant, tout reprendre à zéro ? La réponse est non. |
|
C’est l’élément essentiel. C’est elle qui enrichie à la fois les couleurs, mais aussi les
vernis gras définitifs, les vernis à retoucher ainsi que les
vernis à peindre ou médiums Quelle huile allons nous choisir et quelle modification allons-nous lui apporter ? Réponse : huile de noix cuiteEn peinture, seules quelques huiles végétales et une seule
huile animale peuvent être utilisées : Malgré le fait qu’elle dissout les résines à froid et que non siccative elle forme des vernis qui durcissent normalement, l’huile d’œuf est introuvable. L'huile de noixDans le passé seules l’huile de lin et celle de noix étaient
utilisées. Et, contrairement à ce que l’on pense généralement
l’huile de noix jouissait d’une immense réputation auprès des
vieux Maîtres, elle était la plus utilisée ! Depuis lors,
elle est tombé en discrédit. Autre reproche qu’on lui adresse : elle serait peu siccative. Cela est parfaitement faux et relève de la légende ! Sa siccativité est différente de celle des autres huiles, de lin en particulier. Son séchage lent au départ va s’accentuant au fur et à mesure du temps. Ce qui à première vue peut apparaître comme un défaut est en réalité un avantage considérable en peinture, car son séchage s’effectue harmonieusement dans la masse. Le film de linoxyne qu’elle produit est beaucoup plus beau et résistant que toutes les autres huiles. Elle possède en outre deux avantages : elle jaunit très peu, beaucoup moins que l’huile de lin, et confère à la pâte un moelleux incomparable. Deux expérience simples à réaliser prouveront ce qui vient d’être dit : -Ajoutez à votre peinture quelques gouttes de cette huile crue
et vous constaterez immédiatement le moelleux qu’elle apporte à
votre travail. Je suis plein de respect pour un spécialiste aussi éminent que l’était Xavier de Langlais mais ne comprend toujours pas pourquoi il n’a pas personnellement expérimenté cette huile particulièrement adaptées à la peinture. Je conseille d’utiliser préférentiellement cette huile. Et cuite...Actuellement, pour des raisons évidentes de faible siccativité et de coût, les fabricants emploient des huiles crues. Les anciens, eux, cuisaient l’huile destinée à la fabrication des peintures. Ils lui ajoutaient des résines, puis ils l’exposaient ensuite longuement au soleil, obtenant alors une matière sirupeuse à la couleur de l’ambre le plus foncé et à la siccativité renforcée, aux propriétés très différentes de l’huile crue : 1°/ la viscosité plus accentuée facilite le broyage et donne une pâte qui s’arrondit mieux sous le pinceau. 2°/ une couleur broyée avec une huile cuite est beaucoup plus brillante que celle broyée avec une huile crue. Cette différence s’accentue encore au séchage et le brillant de la couleur broyée à l’huile cuite rappelle l’éclat de l’émail.3°/ la siccativité de l’huile cuite est très nettement accrue. Du simple au double pour une huile ayant cuit 3 heures. Méthode de cuisson de l'huileOn utilisera une casserole émaillée ou mieux une friteuse électrique à température réglable. Attention : celle-ci deviendra alors inutilisable pour la cuisine ! 2 solutions existent : A/ Sur une plaque électrique cuire l’huile pendant 3 heures à une température de 120°. B/ On peut également cuire l’huile en barbotage dans l’eau
(1/3 d’eau, 2/3 d’huile). On augmentera simplement le temps de
cuisson d’une heure, soit 4 heures. Ensuite on séparera l’huile
de l’eau. Nous possédons désormais le produit de base modifié. Avant de nous en servir pour fabriquer des produits annexes : vernis à peindre, vernis à retoucher et vernis gras définitif, nous allons déjà l’utiliser pour fabriquer les peintures.
|
|
On peut évidemment partir des pigments eux-mêmes et effectuer le traditionnel travail de broyage en remplaçant l’huile habituelle par l’huile cuite que nous venons de préparer. Pour ceux que le travail de broyage rebute ou qui ne possèdent pas de pigments, la solution est simple. Comme s’ils préparaient leur palette, ils poseront les noix de couleur sur un buvard ou un papier absorbant épais de couleur blanche. Ils laisseront ainsi leurs peintures le temps qu’elles se déshuilent au maximum. Puis, à l’aide d’un couteau à peindre, ils ajouteront l’huile cuite à chaque noix de couleurs. Pour ma part, ce travail est vite réalisé car je ne travaille qu’avec les 3 primaires, le noir et le blanc selon la loi de la Trichromie des couleurs.
|
|
Les vernis destinés à la peinture artistique se divisent en 3 groupes : 1°/ Les vernis à peindre appelés aussi médiums : Ce sont des diluants qui permettent à l’artiste de modeler la pâte selon son désir, tout en étant des Régulateurs de séchage. 2°/ Les vernis à retoucher qui sont aussi des vernis provisoires. Leur rôle est d’assurer une liaison des couches successives, lors d’une reprise du travail. Ils évitent aussi le phénomène d’embu 3°/ Les vernis définitifs appelés aussi vernis à tableaux. Leur rôle est de protéger l’œuvre de toutes les agressions extérieures, humidité en particulier. Peu d’éléments différencient ces 3 vernis : - Les vernis définitifs possèdent une concentration maximum en résine. - Les vernis à peindre sont de composition similaire aux vernis définitifs, mais allongés d’une essence: térébenthine ou aspic. - Les vernis à retoucher sont très fluides car leur concentration en huile et en résine est bien moindre que dans les deux précédents. Leur diluant est l’essence de pétrole qui leur permet de pénétrer profondément les couches successives. Ils sèchent rapidement. Compte-tenu de ce qui précède, on comprend facilement qu’on obtient les vernis à peindre et à retoucher en partant du vernis définitif. Les préférences des anciensLes préférences des anciens Maîtres allaient aux vernis gras additionnés d’une résine. Les recettes anciennes qui nous sont parvenues rappo rtent l’utilisation quasi-exclusive de 4 résines : Dammar – Mastic – Copal et Térébenthine de Venise. Chacune employée seule ou en coupage.Les recettes anciennes à base de Térébenthine de Venise sont les plus nombreuses. Toutes accordent à reconnaître à ce "Baume" des vertus particulières remarquables :
Cette résine tant louée par les anciens peintres, mais aussi les luthiers, mérite un court développement : - contrairement à ce que peut laisser entendre
son nom, il ne s’agit nullement d’une essence mais d’un baume
qu’on extrait par incision faite dans le tronc du mélèze. Le
baume le plus prisé, appelé "Bijon" est celui qui s’écoule
naturellement de l'arbre durant l’été. La térébenthine de Venise n’a qu’un défaut mineur : elle sèche relativement lentement. Fabrication du vernis gras définitif résineuxNous partons, bien évidemment, de l’huile de
noix cuite que nous avons précédemment fabriquée. Fabrication du vernis à peindre ou mediumAprès avoir porté de l’eau à une
température de 50°, on fait tiédir au bain-marie, loin
du feu, de l’essence d’aspic. Nota : dans les mêmes proportions, on peut
remplacer l’essence d’aspic par de l’essence de térébenthine
commune. On obtiendra alors des vernis plus tirants. Les formules à
l’essence d’aspic sont les plus moelleuses. Fabrication du vernis à retoucherRappelons que ce dernier vernis peut également
servir de vernis d’attente. On fait de même avec le vernis gras définitif résineux. Quand ces deux produits ont tiédit, on les mélange dans la proportion de : - 1 volume de vernis gras pour - 10 volumes d’essence de pétrole. |
|
Les recettes qui viennent d’être données
peuvent être modifiées en fonction de la façon de peindre de
chacun. L’huile de noix peut, bien évidemment, être remplacée par de l’huile de lin, voire par de l’huile de Tournesol que l’on peut récupérer déjà cuite dans la friteuse de la cuisine. Dans ce dernier cas, la mettre à décanter et à clarifier au soleil !…. D’autre part, d’autres résines pourront être utilisées seules ou mélangées : Mastic, Dammar, Sandaraque, Elémi, Gomme laque (Voir à ce sujet : Résines naturelles et vernis traditionnels, cours préparé par Mr MENARD). On aura soin alors de ne pas dépasser leur température de fusion. En ce qui concerne l’Ambre et le Copal leur dissolution nettement plus complexe réclame un matériel adéquat : mantras en particulier. Comme on peut le constater, chacun peut
facilement concevoir ses propres produits en fonction de sa façon
de peindre et de ses goûts personnels. Il suffit de savoir : Les puristes, s’ils le désirent, pourront s’approcher
davantage encore de la technique des anciens en fabricant une Huile
essentielle de térébenthine de Venise proche de
celle qu’utilisaient les anciens Maîtres. Voici comment
procéder : Ce dernier produit pourra alors servir d’essence pour la préparation des Vernis maigres. Enfin, pour tous ceux qui désire récolter leur
propre Bijon (Baume de mélèze), voici comment le traiter par la
technique de l’enfleurage utilisée en parfumerie, pour obtenir un
produit débarrassé de toutes ses impuretés : |
|
||
|
||
|